Pas évident d'illustrer le thème du mois dans la communauté des 'Couleurs dans notre vie', à savoir le Noir et le Blanc, quand on est comme moi un accro aux couleurs de l'arc-en-ciel.
En y réfléchissant bien cependant, cette immersion bicolore pourrait être l'occasion rêvée pour trouver la réponse à une question qui me taraude depuis bien longtemps.
Dans la nuit de nos villes, lorsque la lune a fait surgir des contrastes violents entre lumière et ombre, à quelles activités peuvent bien se livrer les statues alors qu'autour d'elles un calme apaisant a enfin succédé à l'infernal tintamarre quotidien ?
Afin de résoudre cette énigme, je me suis glissé dans la pénombre urbaine, sous l'oeil inquisiteur d'une 'fashion victim' bien inconfortablement détenue dans sa prison de verre.
Dans les vitrines, les mannequins avaient abandonné leur poses hiératiques, épuisées sans doute par les longues heures passées à soutenir imperturbablement le regard des chalands.
Quelle ne fut pas ma surprise de constater que la première statue rencontrée descendait tranquillement de son socle pour, à n'en pas douter, se dégourdir les jambes.
Une autre s'étirait voluptueusement pour délasser des membres endoloris par une interminable inaction.
Une autre encore, ivre d'une liberté retrouvée, laissait exploser sa joie en une danse sauvage et désordonnée.
Un athlète affrontait un ennemi invisible et réveillait ainsi des muscles tétanisés.
Moins chanceux, un doux éphèbe se voyait condamné à l'ankylose pour ne pas déranger les oiseaux venus chercher auprès de lui un refuge nocturne.
Dans le parc proche, une fontaine vaguement inquiètante continuait à glouglouter.
Les enfants paraissaient effrayés par ce lancinant voisinage.
Avant que le jour ne se lève à nouveau, beaucoup avaient sombré dans un profond sommeil.
Rêvaient-ils à une liberté dont ils ne pouvaient concevoir l'existence ?
Dans un coin isolé du parc, un homme s'était assis. Dès les premières lueurs de l'aube il reprendrait sa position et tout redeviendrait normal car il n'est pas dans l'ordre des choses que les statues échappent, ne serait-ce qu'un instant, à la pose dans laquelle leur sculpteur les figea à jamais.
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