Pour cette deuxième promenade en zigzag, je vous convie à une balade franchement iconoclaste en compagnie de quelques représentants de la statuaire parisienne..
A Champs-Elysées - Clémenceau, le général De Gaulle presse le pas sous un ciel d'orage à la rencontre de son glorieux destin.
De l'autre côté de la place, Clémenceau se demande comment le général peut avancer si vite avec un tel vent.
Sur le parvis du Grand Palais, deux bambins stupides n'ont rien trouvé de mieux à faire que de s'ouvrir le ventre à coups de burin. Voilà ce qui arrive quand on laisse de vilains garnements sans surveillance.
Rue de Sèvres, ces deux là ont l'air trop gentils pour être honnêtes. Dieu sait quel tour pendable sont-ils en train de manigancer.
Sur la face Nord de l'Arc de Triomphe, ce vieillard est mort de peur et s'accroche où il peut. Se rend t-il seulement compte qu'il entrave ainsi la marche du guerrier ?. Vieillesse ne rime pas forcément toujours avec sagesse.
Du côté du Petit Palais on s'ennuie ferme, mais, direz-vous, dans une vie de statue les divertissements sont plutôt rares.
Au cimetière du Père Lachaise, on n'a pas vraiment le moral, mais après tout, quoi de plus naturel en ce lieu.
Au cimetière Montparnasse, par contre, il y a quelqu'un qui ne parvient pas à trouver le repos, Charles Pigeon, l'inventeur de la célébrissime lampe. Lui qui a permis à l'humanité de bénéficier d'inventions aussi géniales qu'un matelas insubmersible et une table de nuit inodore (!) tourne et retourne dans sa tête des projets qui, n'en doutons pas, devraient mettre en émoi la communauté scientifique.
Sur le pont de Grenelle, la statue de la Liberté, histoire de se rendre utile, a décidé de régler elle-même la circulation.
Sous le pont Mirabeau coule la Seine, ce n'est pas nouveau, et cette baigneuse impudique essaie vainement d'obtenir de l'aide pour atteindre le parapet.
Rue d'Abbeville, à la vue de ces affriolantes cariatides, on se demande vraiment quelle frustration poussait nos arrière grands-parents, qui prenaient des bains de mer tout habillés, à orner la façade de leurs immeubles d'accortes personnes aussi dévêtues.
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Pas de quoi en tous cas distraire les doctes savants du Museum d'Histoire Naturelle qui posent pour la postérité devant leurs chers ossements blanchis.
Aux Invalides, l'Homme Invisible se repose après la bataille.
A Montmartre, le Passe-Muraille aux longs doigts décide, lui, de réapparaître à la vue de tous.
Sur le chantier du Trou des Halles, l'Homme qui écoute, téléphone pour savoir quand vont enfin se terminer les travaux.
Quai Anatole France on croit entendre ce beau jeune homme - qui visiblement n'a même pas eu le temps de se rhabiller - s'exclamer : 'Ciel, son mari !!'
Heureusement, le temps n'est pas aussi mauvais que l'hiver dernier quand les statues du Parc Monceau se recroquevillaient en grelottant de froid sous la neige.
Sur le parvis du Musée d'Orsay, ces imposantes dames de fer , qui ont connu l'ancienne gare, dévisagent avec incrédulité la petite effrontée, tout de même impressionnée, qui ose ainsi venir troubler leur sévère assemblée.
Aux Arènes de Lutèce, cette dame a carrément perdu la tête.
Au square Nadar, le malheureux chevalier de la Barre a retrouvé la sienne. Il faut dire qu'à peine âgé de 19 ans, ce gentilhomme avait été décapité en 1765 non sans avoir au préalable subi la question ordinaire et extraordinaire, eu la langue et le poignet coupés et être enfin brûlé vif. Tout cela en punition de quel crime atroce direz-vous : simplement parce qu'il n'avait pas soulevé son chapeau au passage d'une procession !! Autres temps, autres moeurs ... quoi que ...
A quelques pas de là, en l'église Saint Pierre de Montmartre, Saint Denis tient délicatement sa tête devant lui. Selon la légende, le premier évêque de Paris, martyrisé lui aussi, avait été privé de son chef. Avant d'aller s'enterrer dans le Neuf Trois, il aurait marché pendant 6 kilométres en portant sa tête sous le bras, traversant Montmartre par le chemin devenu depuis la rue des Martyrs (quelle coïncidence !).
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Rue Fortuny, des rats à la dentition particulièrement solide grignotent un mur de l'hôtel particulier de Sarah Bernhardt comme s'il s'agissait d'un vulgaire morceau de fromage.
Sur la façade est de l'Hôtel de Sens, un boulet perdu des journées révolutionnaires de 1830 est venu se ficher dans le mur. Il y est toujours, la date de l'événement étant gravée au dessous.
Boulevard Saint-Germain, le mur du Ministère de la Guerre .. pardon, du Ministère des Armées, exhibe toujours fiérement les stigmates des combats furieux de la Libération de Paris.
Rue Royale, à deux pas de chez Maxim's, on peut toujours trouver placardé l'Avis de Mobilisation Générale, mais qui s'en soucie à présent ?
Peut-être que le général devrait revenir mettre un peu d'ordre dans tout çà ?
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