Le 3 Février 1931 restera à jamais un jour funeste dans l'histoire de la jolie ville de Napier qui s'étire langoureusement le long de la superbe Hawke's Bay, à l'Est de l'île du Nord de la Nouvelle Zélande.
Ce jour là, à 10h47 du matin, et pendant 2'30", un tremblement de terre de 7,8 degrés sur l'échelle de Richter, faisait 256 victimes et réduisait la totalité du centre ville en un indescriptible amas de ruines.
Une plaque apposée sur la merveilleuse promenade du bord de mer évoque aujourd'hui ce terrible événement :
" Je n'ai jamais compris comment un homme pouvait oser regarder une ville réduite à néant, ressentir les secousses, entendre le vacarme tragique des maisons qui se tordent et les craquements de tous côtés, sans être saisi d'un insondable désespoir. En dépit de ses bâtiments réduits à un amas de débris sans valeur, l'homme a toujours trouvé la force d'ériger à cet endroit même une cité plus forte. En mon âme, j'avais construit de hautes tours. Elles ne sont plus que ruines et pourtant j'ai recommencé à construire, projetant de restaurer ce que la vie avait jeté à terre, et ma foi élèvera mes tours à l'assaut du soleil : une ville plus forte qu'elle n'était auparavant. "
A Napier, comme d'ailleurs un peu partout dans ces îles du bout du monde restées longtemps isolées, on a conservé l'esprit pionnier et, passé le moment d'abattement et de désolation, on se mit bien vite au travail pour reconstruire la ville.
Comme on était, dans les années 30, à l'apogée de l'Art Déco, on reconstruisit tout le centre ville dans le style Art Déco et c'est ainsi que de nos jours, Napier est devenue le plus extraordinaire musée Art Déco à ciel ouvert qu'il soit donné de visiter.
Au fil des années, les autorités municipales de la ville ressuscitée comprirent très vite quel énorme potentiel touristique représentait cette exposition permanente d'un style devenu culte et encouragèrent toute initiative visant à mettre l'Art Déco à l'honneur.
On créa un Art Déco Trust, un Art Déco Center, on invita des artistes à créer sur le thème Art Déco, on organisa dans le cadre d'un Art Déco Festival, des bals costumés Art Déco, des parades Art Déco, des présentations de mode Art Déco, des projections de films d'époque, des concerts, des défilés de véhicules et de trains vintage, des démonstrations en vol d'avions de la Première guerre mondiale. On mit sur pied une Gatsby party, une Prohibition party ..
Bref, le centre ville salamandre se mit à vivre au rythme du swing, du one-step, du charleston et des airs de Cole Porter que l'on pouvait entendre en fond sonore dans les cafés et les restaurants tandis que sur écran, Humphrey Bogart et Lauren Bacall poursuivaient des dialogues initiés bien des années auparavant..
Quant aux commerçants, l'aubaine était trop belle et les vitrines aguicheuses regorgèrent d'objets rétro et de vêtements et d'accessoires vintage, faisant de cette ville un pôle d'attraction incontournable pour les nostalgiques des années 30 et l'un des sites touristiques les plus visités de Nouvelle Zélande.
A la Maison de l'Opossum, l'ennemi public numéro 1, une chorale de ces voraces marsupiaux interprète un charleston endiablé.
Cadeau malvenu du grand voisin australien, ces animaux à l'appétit dévorant se reproduisent à une vitesse phénoménale et engloutissent chaque jour des tonnes d'une végétation en grande partie endémique. Etant donné qu'ils s'attaquent aussi aux oiseaux et petits animaux, eux aussi endémiques, y compris, abomination des abominations, aux jeunes kiwis, ce qui pour un néo-zélandais est un crime inqualifiable, leur destruction est considérée comme un acte de civisme.
Leur fourrure étant douce, chaude et légère, on en fait donc des chaussettes, des gants, des écharpes ou des bonnets .... vintage, bien sûr !
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(toutes les photos sont de l'auteur, les illustrations représentant la ville en ruines étant placardées sur les murs des bâtiments actuels aux endroits précis où avaient été réalisés les clichés au moment du désastre)