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13 novembre 2018 2 13 /11 /novembre /2018 09:41

 

C'était un village oublié dans le nombril de l'Inde, 

le Madhya Pradesh.

A la saison sèche, il y fait une chaleur d'enfer.

Aujourd'hui, on y trouve des hôtels, des restaurants, des parcs ombragés, un aéroport, des touristes et des boutiques de souvenirs.

Comme partout en Inde, quand on se promène dans ses vieux quartiers, la couleur est omniprésente.

 

 

Comme partout dans l'Inde rurale, les vaches déambulent en liberté et, comme elles sont d'un naturel curieux, elles ne dédaignent pas de jeter un cil dans les échoppes des marchands.

 

 

Mais ce qui a fait que ce lieu est devenu une étape incontournable des circuits touristiques et s'est retrouvé inscrit par l'Unesco au patrimoine mondial de l'humanité, est la redécouverte en 1840 d'un extraordinaire ensemble de temples noyés dans la végétation et a demi détruits, datant des IXème et Xème siècles, du temps de la dynastie éclairée et tolérante des Chandella.

 

 

Ces temples, -il en reste une vingtaine alors qu'ils devaient être plus de quatre vingt à l'origine -hindouistes, bouddhistes et jaïn, présentent la particularité, qui choqua beaucoup les premiers découvreurs, d'être un hymne à l'amour charnel.

La plupart d'entre eux sont recouverts, à l'extérieur et parfois même à l'intérieur, d'un foisonnement de figures gracieuses, couples enlacés, personnages idéalisés, scènes amoureuses, jeunes femmes sensuelles tenant délicatement un miroir ou se teignant, dans un geste exquis, la plante du pied, mais aussi scènes de batailles, danses, luttes d'animaux, activités quotidiennes, êtres fantastiques.

Pas de surface qui ne soit ornée, sans pour autant nuire aux lignes générales des ouvrages.

 

 

Si l'acte sexuel est souvent représenté de façon suggestive, parfois donnant lieu à des positions qui laisseraient perplexe le plus athlétique adepte du Kâmasûtra, les sculptures, dans leur ensemble sont d'une saisissante beauté. 

Car c'est bien d'une divinisation de l'érotisme qu'il s'agit. La plénitude des corps, l'exaltation des formes féminines, les déhanchements voluptueux, les étreintes,  ne sont là que pour rappeler aux humains la beauté des énergies divines. L'union de tous ces dieux et de tous ces êtres célestes symbolise l'union mystique à l'âme universelle.

Toutes ces sculptures en haut-relief ou en ronde-bosse si habilement disposées par leurs créateurs et qui ceinturent les temples de tous côtés, reflètent l'infinie variété des formes de vie.

Contrairement à certains touristes qui ne sont attirés que par l'aspect érotique des sculptures, les fidèles indiens continuent d'honorer les dieux et les déesses  qui leur montrent la voie vers l'accomplissement de toute vie, 

Vêtues de leurs plus chatoyants saris, les femmes, en majorité, tournent autour des sanctuaires dans le sens de la marche du soleil. Elles déposent des offrandes de fleurs dans les niches des divinités et répandent sur le sol des pétales et de l'eau parfumée.

 

 

Les souriantes sculptures continuent de veiller avec bienveillance sur le devenir des humains. 

Elles ont eu la chance de parvenir jusqu'à nous, échappant aux guerres et aux fanatismes religieux qui ont causé tant d'irréparables dommages à travers le monde.

 

oooOOOooo

Khajurâho, l'érotisme divinisé.
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27 décembre 2017 3 27 /12 /décembre /2017 12:18

 

N'allez surtout pas penser qu'il s'agit ici d'une aberration chromatique résultant d'une utilisation irraisonnée de Photoshop.

L'incroyable couleur vert fluo de l'eau contenue dans cette vasque naturelle est bien  réelle et les spécialistes vous diront qu'elle est en fait due à une très forte concentration d'arsenic

 

 

Cette vasque a été surnommée la 'Baignoire du Diable' et on ne serait pas autrement surpris de voir émerger de ce bouillon toxique un monstre gluant digne du plus horrifique film de science-fiction.

 

 

Nous sommes à Wai- O - Tapu, le parc géothermique  le plus important de l'île du Nord de la Nouvelle-Zélande. à proximité de Rotorua.  En Maori, cela signifie 'l'Eau Sacrée' et on imagine sans peine les sentiments qui durent traverser l'esprit des premiers découvreurs de ces extraordinaires phénomènes naturels.

Car ici, où il lui arrive de marcher à quelques centimètres au-dessus d'un chaudron en ébullition, l'Homme prend conscience de sa fragilité face aux forces monstrueuses de la Nature. Sous ses pieds, des plaques tectoniques s'affrontent et, en surface, au beau milieu d'une riante végétation, ce ne sont que vapeurs brûlantes, bouillonnements, gargouillis, geysers et odeur de soufre.

 

 

 

 

 

Car ici, c'est bien à une promenade sur le territoire du Malin que l'on est convié.  Outre la 'Baignoire du Diable', on peut aussi contempler les 'Encriers du Diable', emplis d'une boue glougloutante, la 'Maison du Diable' avec ses cristaux de soufre jaune, le 'Cratère de l'Enfer' qui bouillonne toujours violemment et, pour parfaire l'illusion vous vous retrouvez enveloppé de vapeurs et poursuivi par l'odeur insidieuse des gaz sulfureux.

 

 

 

Pour les passionnés de chimie, cet enfer a des allures de paradis car on vous explique que si le jaune est synonyme de soufre, la couleur orange est révélatrice d'antimoine, le blanc de silice, le vert d'arsenic, le rouge-brun d'oxyde de fer, le violet de manganèse, etc.. etc.. La 'Piscine de champagne', la plus spectaculaire, avec ses 60m de diamètre, ses 60m de profondeur et son eau à 74°C est un concentré de métaux rares et ses bulles viennent crever une surface aux teintes psychédéliques.

 

  

 

 

La 'Palette de l'Artiste' quant à elle, semble refléter la fureur avec laquelle un peintre démiurge s'est efforcé lors du grand chaos initial d'illustrer les bouleversements auxquels il assistait.

 

 

 

 

Le plus extraordinaire est que, dans cet environnement létal la vie continue. Une échasse blanche déplace précautionneusement ses longues jambes dans cette soupe empoisonnée dont elle semble totalement immunisée.

 

 

Les arbres, à proximité immédiate des émanations sulfureuses, se sont recouverts d'une algue appelée 'trentepohlia', de couleur rouge ou orange, qui protège leur chlorophylle et leur permet de survivre, donnant aux paysages de sous-bois un aspect fantasmagorique.

 

 

 

Mais, direz-vous, et la Lady dans tout çà ?

J'y viens justement. A une centaine de mètres du parc proprement dit un petit monticule de silice  laisse échapper des vapeurs chaudes. Il n'attirerait pas particulièrement l'attention si ce n'est qu'à heure fixe - à 10h15 du matin précisément - il se transforme en un impressionnant geyser  En fait, s'il était livré à lui-même, l'horaire de cette transformation serait totalement aléatoire et seuls quelques touristes chanceux se trouveraient au bon endroit au bon moment pour observer le phénomène.

 

 

Les responsables du parc, qui ont un sens commercial aigu, ont jugé plus commode de 'réveiller' le geyser tous les jours à heure fixe, ce qui permet de concentrer un maximum de visiteurs qui doivent alors débourser un supplément au tarif d'accès au parc pour assister à la chose. Ce sont en fait les conditions dans lesquelles le phénomène a pour la première fois été observé, seulement au tout début du XXème siècle, qui sont à l'origine de cette idée de réveil (et qui expliquent aussi pourquoi cette découverte tardive n'a pas de nom Maori).

En 1901, quelques prisonniers affectés par l'administration pénitentiaire à des travaux dans la zone, lavaient leur linge, profitant de l'eau chaude fournie généreusement et gratuitement par mère Nature. L'un d'eux, l'opération terminée, jeta négligemment les restes de savon dans la bouche du cratère. Il s'en suivit l'éruption d'un geyser de plus de 20m de haut. On imagine sans peine l'émoi de ces prisonniers voyant leurs sous-vêtements s'envoler ainsi brutalement.

On sait maintenant que le savon agit comme un 'tensioactif' libérant l'énergie compressée entre deux masses liquides de températures différentes, ce qui permet donc de présenter à heure fixe une belle éruption aux visiteurs assemblés pour le spectacle dans un amphithéâtre construit tout exprès autour de la vedette de silice. 

Après sa découverte, on attribua au geyser le nom de 'Lady Knox' en hommage à l'épouse du gouverneur britannique d'alors. L'histoire ne dit pas s'il fut attribué malicieusement en référence aux débordements de la dame...

Après un long discours de présentation destiné à chauffer l'assistance, 'Lady Knox' reçoit donc sa dose journalière de savon et commence à éructer, fumer et baver impunément de plus en plus fort sous les yeux et les caméras du public. L'éruption liquide intervient à peine 2 minutes plus tard et propulse dans les airs un joli jet d'eau, moins impressionnant toutefois que celui du lac Léman à Genève...

 

 

Le paroxysme, immortalisé par les smartphones et appareils photos de tous types  brandis avec un bel ensemble par la totalité des spectateurs. dure moins d'une quarantaine de secondes avant que le jet ne retombe mollement et que la centaine de touristes, venus des quatre coins du monde ne regagne sagement cars et véhicules.

En repassant dans le parc, maintenant bondé à ce moment de la journée, il m'a semblé percevoir un rire sourd provenant du fond de la baignoire verte 

Mais peut-être n'était-ce qu'un oiseau dans le sous-bois ..

 

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(photos de l'auteur).

 

 

 

 

 

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17 décembre 2017 7 17 /12 /décembre /2017 17:30

 

Le 3 Février 1931 restera à jamais un jour funeste dans l'histoire de la jolie ville de Napier qui s'étire langoureusement le long de la superbe Hawke's Bay, à l'Est de l'île du Nord de la Nouvelle Zélande.

Ce jour là, à 10h47 du matin, et pendant 2'30", un tremblement de terre de 7,8 degrés sur l'échelle de Richter, faisait 256 victimes et réduisait la totalité du centre ville en un indescriptible amas de ruines.

 

 

 

Une plaque apposée sur la merveilleuse promenade du bord de mer évoque aujourd'hui ce terrible événement :

" Je n'ai jamais compris comment un homme pouvait oser regarder une ville réduite à néant, ressentir les secousses, entendre le vacarme tragique des maisons qui se tordent et les craquements de tous côtés, sans être saisi d'un insondable désespoir. En dépit de ses bâtiments réduits à un amas de débris sans valeur, l'homme a toujours trouvé la force d'ériger à cet endroit même une cité plus forte. En mon âme, j'avais construit de hautes tours. Elles ne sont plus que ruines et pourtant j'ai recommencé à construire, projetant de restaurer ce que la vie avait jeté à terre, et ma foi élèvera mes tours à l'assaut du soleil : une ville plus forte qu'elle n'était auparavant. " 

 

 

A Napier, comme d'ailleurs un peu partout dans ces îles du bout du monde restées longtemps isolées, on a conservé l'esprit pionnier et, passé le moment d'abattement et de désolation, on se mit bien vite au travail pour reconstruire la ville.

Comme on était, dans les années 30, à l'apogée de l'Art Déco, on reconstruisit tout le centre ville dans le style Art Déco et c'est ainsi que de nos jours, Napier est devenue le plus extraordinaire musée Art Déco à ciel ouvert qu'il soit donné de visiter.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Au fil des années, les autorités municipales de la ville ressuscitée comprirent très vite quel énorme potentiel touristique représentait cette exposition permanente d'un style devenu culte et encouragèrent toute initiative visant à mettre l'Art Déco à l'honneur.

On créa un Art Déco Trust, un Art Déco Center, on invita des artistes à créer sur le thème Art Déco, on organisa dans le cadre d'un Art Déco Festival, des bals costumés Art Déco, des parades Art Déco, des présentations de mode Art Déco, des projections de films d'époque, des concerts, des défilés de véhicules et de trains vintage, des démonstrations en vol d'avions de la Première guerre mondiale. On mit sur pied une Gatsby party, une Prohibition party ..

Bref, le centre ville salamandre se mit à vivre au rythme du swing, du one-step, du charleston et des airs de Cole Porter que l'on pouvait entendre en fond sonore dans les cafés et les restaurants tandis que sur écran, Humphrey Bogart et Lauren Bacall poursuivaient des dialogues initiés bien des années auparavant..

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Quant aux commerçants, l'aubaine était trop belle et les vitrines aguicheuses regorgèrent d'objets rétro et de vêtements et d'accessoires vintage, faisant de cette ville un pôle d'attraction incontournable pour les nostalgiques des années 30 et l'un des sites touristiques les plus visités de Nouvelle Zélande.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

A la Maison de l'Opossum, l'ennemi public numéro 1, une chorale de ces voraces marsupiaux interprète un charleston endiablé.

 

 

Cadeau malvenu du grand voisin australien, ces animaux à l'appétit dévorant se reproduisent à une vitesse phénoménale et engloutissent chaque jour des tonnes d'une végétation en grande partie endémique. Etant donné qu'ils s'attaquent aussi aux oiseaux et petits animaux, eux aussi endémiques, y compris, abomination des abominations, aux jeunes kiwis, ce qui pour un néo-zélandais est un crime inqualifiable, leur destruction est considérée comme un acte de civisme.

Leur fourrure étant douce, chaude et légère, on en fait donc des chaussettes, des gants, des écharpes ou des bonnets .... vintage, bien sûr !

 

 

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(toutes les photos sont de l'auteur, les illustrations représentant la ville en ruines étant placardées sur les murs des bâtiments actuels aux endroits précis où avaient été réalisés les clichés au moment du désastre) 

 

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11 décembre 2017 1 11 /12 /décembre /2017 15:13

 

Frappé de plein fouet par la crise économique et l'arrêt de toute activité portuaire, le quartier de La Boca aurait très bien pu ne pas survivre et disparaître peu à peu au rythme de la désagrégation de ses habitations de tôle colorée. C'est à un peintre, devenu par la suite célèbre dans toute l'Amérique du sud, Benito Quinquela Martin (1890-1977), qu'il doit de figurer à présent à la une des dépliants touristiques.  

 

 

Déposé bébé à la porte d'un orphelinat de Buenos Aires, il fut recueilli six ans plus tard par un immigré italien qui exerçait la profession de charbonnier à La Boca. A l'âge de 17 ans, il s'inscrivit à un cours de dessin et ce fut le début d'une carrière de peintre qu'il consacra quasi exclusivement à décrire avec force les joies et les peines du petit peuple de La Boca et plus particulièrement le dur labeur des ouvriers du port.

 

 

Benito Quinquela Martin - 'En pleno sol' huile sur toile - 1931

 

Aujourd'hui, un petit musée lui est consacré à l'entrée du Caminito où sont rassemblées quelques-unes de ses oeuvres. C'est dans ce lieu qu'il créa un atelier pour venir en aide aux artistes locaux et qu'il eu l'idée, dans les années 50, pour tenter de remédier au déclin du quartier, de transformer le Caminito désaffecté en un musée à ciel ouvert. C'est pour cela que l'on peut désormais admirer dans cette petite voie bordée de maisons colorées, à côté des chromos proposés par les vendeurs ambulants, des œuvres de fort belle facture d'artistes argentins ou d'autres pays d'Amérique du sud, qui bénéficient à cette occasion d'arrière-plans aux couleurs plus que soutenues.

 

 

 

 

 

 

A noter incidemment, car cela est d'importance, que c'est également dans les années 50  que fut parachevé le mythique stade de La Boca, surnommé La Bombonera à cause de sa forme, où devait s'illustrer par la suite le dieu vivant Maradona au sein de l'équipe légendaire de l'Atletico Boca Junior.

Mais alors direz-vous, tous les ingrédients sont réunis pour faire de ce quartier défavorisé de Buenos Aires un pôle d'attraction touristique majeur.

 

 

 

 

Il l'est effectivement en dépit de l'insécurité récurrente qui taraude le quartier, mais ce que le touriste vient chercher et trouve dans ce tout petit périmètre autour de la calle Carminito, dont il serait fort imprudent de trop s'éloigner, c'est en fait

l'ILLUSION.

L'illusion que tous ces personnages en stuc, le Pape et Maradona (on devrait plutôt dire Maradona et le Pape), Evita Peron, Carlos Gardel et bien d'autres célébrités argentines, font partie du décor festif de ce quartier populaire.

 

 

 

 

 

 

 

L'illusion que ces façades aux couleurs vibrantes sont authentiques et ne sont pas repeintes tous les hivers en tons de plus en plus criards.

 

 

 

 

 

 

 

L'illusion que ces restaurants, ces cafés, ces bars, ces pizzeria sont tenus par les descendants des immigrés italiens d'autrefois.

 

 

 

 

 

 

 

L'illusion que dans toutes ces boutiques de souvenirs une grande partie de la bimbeloterie étalée aux yeux des touristes n'est pas 'made in China'.

 

 

 

 

 

L'illusion que le tango, cette 'pensée triste qui se danse', est né à La Boca et que tous ces couples de danseurs loués par les cafés et restaurants pour fixer le client sont originaires du quartier.

 

 

 

 

 

L'illusion que ce vieux monsieur au visage buriné, qui vend des bricoles sur un banc vert pomme est en fait un ancien pêcheur.

 

 

Bercé par tant d'illusions, vous pourrez alors pour la modique somme de 10 pesos, passer la tête dans la représentation d'un fier tanguero qui propulse sa partenaire dans des figures défiant les lois de la pesanteur.

 

 

Voilà pourquoi les habitants des beaux quartiers de Buenos Aires sont plutôt réticents quand on associe ces clichés concernant La Boca à l'image de leur grande métropole.

Et pourtant, à quelques mètres à peine de cet îlot multicolore et artificiel il y a de vrais gens qui vivent dans des habitations modestes, colorées certes, mais tout de même moins 'flashy' qu'au cœur du Caminito.

 

  

 

 

 

 

 

En quittant La Boca, on passe par les quais, désormais silencieux, dont les pavés, pour faire bonne mesure, ont aussi été peints.

 

 

Sur la rive opposée, on peut apercevoir l'ombre portée des travailleurs portuaires de jadis.

 

 

En regagnant le quartier chaleureux de San Telmo, qui mériterait bien lui aussi un article, je suis tombé, au fond d'un garage, sur une fresque représentant en mode quelque peu misérabiliste, deux jeunes laissés pour compte au beau milieu de la plus large avenue du monde, l'avenida 9 de Julio.

La légende dit ceci: 'le soleil se lève pour tout le monde'.

 

 

 

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(A l'exception de la reproduction du tableau de Benito Qinquela Martin 'En pleno sol', repris sur le web, toutes les photos des deux volets de cet article sont de l'auteur)

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8 décembre 2017 5 08 /12 /décembre /2017 18:48

 

Si vous faites part à un habitant des beaux quartiers de Buenos Aires de votre souhait de visiter La Boca à l'extrémité sud de la grande métropole argentine, il est très probable que vous le sentirez quelque peu réticent. Si, en outre, vous lui faites remarquer que ce quartier aux maisons colorées si 'pittoresques' figure en couverture de la plupart des guides touristiques du monde entier, vous risquez fort de l'agacer pour de bon.

C'est que la capitale de l'Argentine est une ville moderne avec des gratte-ciel futuristes, de belles avenues, des monuments superbes et des quartiers que l'on a souvent comparés pour leur charme à leurs homologues parisiens.

 

 

 

 

Réduire l'image de Buenos Aires à un empilement de pauvres masures en tôles aux couleurs criardes est vraiment trop réducteur, et ce n'est pas faute d'avoir averti le touriste des dangers qu'il y a à se promener dans ce quartier déshérité :

N'y allez surtout pas seul, ne vous écartez pas des ruelles principales et ne vous y risquez absolument pas la nuit !!

Mais voilà, l'attraction est trop forte et les touristes-voyeurs affluent en nombre - de jour, bien entendu - et arpentent les quelques dizaines de mètres qui constituent le cœur de cette étrange cité, bordés de constructions improbables aux couleurs pétantes.

 

 

 

 

 

 

 

Mais quelle est donc la raison de cet étrange dérèglement chromatique ??

Il faut remonter à la seconde moitié du XIXème siècle pour en comprendre l'origine. A cette époque, le port de La Boca, durement conquis sur une zone lagunaire régulièrement envahie par les eaux mêlées du Rio de la Plata et du rio Riachuelo est en pleine acitivité. Les navires se bousculent à quai apportant des marchandises du monde entier. C'est le début de l'industrialisation, les fumées des fabriques obscurcissent le ciel et le chemin de fer est parvenu jusqu'à la rive. Il faut de la main d'oeuvre, beaucoup de main d'oeuvre. Les immigrants sans le sou arrivent en masse, fuyant la misère de leur pays d'origine et s'engagent comme ouvriers, dockers, portefaix ...

 

 

 

 

Ne dit-on pas ici que si le Mexicain descend des Aztèques et le Péruvien des Incas, l'Argentin, lui, descend du bateau tant l'immigration est un facteur majeur du peuplement de ce pays.

Beaucoup de ces nouveaux arrivants sont italiens, et parmi eux un grand nombre de gênois. Trop pauvres pour habiter de vraies maisons, ils s'installent dans des constructions de bric et de broc faites de tôles et de débris divers ramassés sur les quais. Afin d'égayer un peu ces assemblages hétéroclites, ils les peignent avec des restes de peinture à bateau qui leur rappellent les teintes chaudes des façades de leur Ligurie natale.

Ces immigrants vont former le noyau du premier prolétariat ouvrier argentin et être de tous les combats pour la reconnaissance de leurs droits.

En 1882, à la suite d'une grève générale, ils iront jusqu'à déclarer la création d'une république de La Boca sous la bannière du drapeau gênois !

 

 

La répression qui s'en suivit fut féroce et le Président argentin d'alors Julio Argentino Roca vint en personne détacher le drapeau gênois qui flottait sur la petite enclave rebelle.

Depuis, les habitants de La Boca sont toujours prompts à se soulever contre les autoritarismes de tous types et ce quartier réputé chaud conserve une solide tradition d'éternel rebelle. 

 

 

 

 

Le transfert des activités portuaires à la fin du XIXème siècle vers des zones plus adaptées au nord de l'agglomération sonna le déclin de La Boca. Le départ des industries et les différentes crises économiques affectèrent gravement le quartier qui, en un demi-siècle perdit plus de la moitié de sa population. Au milieu du XXème siècle, le port avait totalement cessé toute activité et un prolétariat bolivien et uruguayen avait peu à peu remplacé les italiens d'autrefois.

L'herbe poussait entre les pavés disjoints du Caminito, la voie de chemin de fer désaffectée, et nombre des étranges constructions de tôles se désagrégeaient rapidement laissant apercevoir par les fenêtres ouvrant sur le vide des morceaux de ciel à la Magritte. 

 

 

 

 

'à suivre'

 

 

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30 juillet 2017 7 30 /07 /juillet /2017 14:37

 

Ceci est la reprise, sous une forme, disons, plus 'dynamique' 

 d'un article publié il y a un peu plus de trois ans

à la suite d'un voyage effectué dans l'Ouest américain.

J'y avais été particulièrement impressionné par l'atmosphère étrange

qui émanait de la ville-minière fantôme de Bodie, en Californie.

L'article aurait tout aussi bien pu s'intituler

'Le Temps suspendu'

tant il était émouvant d'apercevoir au travers des vitres sales

des maisons de bois brinquebalantes, les témoignages figés

d'une vie domestique qui paraissait s'être soudainement arrêtée

il y a plus d'un siècle..

 

Les deux moments musicaux dans la vidéo sont des extraits d'une icone de la Musique Country, 'Dark as a Dungeon', écrite par Merle Travis en 1946 , dans l'interprétation de Willie Nelson. Cette chanson, devenue pratiquement l'hymne des mineurs des Appalaches, relate la dure vie des mineurs de fond. Elle a également été interprétée - entre autres - par Johnny Cash, Bob Dylan, Harry Belafonte, Joan Baez, Odetta, Ray Charles etc..

 

Le refrain peut se traduire de la façon suivante:

 

"Et c'est sombre comme un cachot et humide comme la rosée,

            Le danger y est double et les plaisirs sont rares,

La pluie n'y tombe jamais, le soleil n'y brille jamais,

Et il fait noir comme dans un cachot, tout en bas dans les mines."

 

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Les Fantômes de Bodie (2)
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30 mars 2017 4 30 /03 /mars /2017 19:04

 

Si l'Eloge de la Lenteur' n'avait pas déjà été écrit,

il faudrait absolument l'écrire à propos de la 

'Flâneuse du Nil'

 

C'est le nom d'une dahabieh, le bateau traditionnel à fond plat

et à deux voiles latines qui, jusqu'au XIXème siècle

constituait l'unique mode de navigation sur le Fleuve Roi.

 

 

Aidée d'un petit remorqueur ou, lorsque les conditions sont favorables,

naviguant tranquillement à la voile,

la dahabieh est le moyen de transport idéal

pour jouir pleinement du spectacle offert par les rives. 

 

 

Tout à bord respire le calme, pas de bruit de moteur.

On ne perçoit que le clapotis du fleuve.

Bercé par le lent et hypnotique défilement de la rive,

on se sent peu à peu gagné par un délicieux engourdissement.

 

 

En des temps moins troublés, 

des centaines de gros bateaux, rutilants et motorisés,

chargés à ras bord de leur cargaison de touristes pressés,

faisaient, en un va-et-vient incessant, la navette entre Louxor et Assouan. 

Leur sillage érodait chaque jour un peu plus des berges

qui, il y a bien longtemps, regardaient passer la barque du Pharaon.

 

 

La baisse de la fréquentation touristique a fait que le flux s'est notablement réduit

et l'habile capitaine peut désormais surveiller d'un oeil expert 

des manoeuvres rendues peut-être moins délicates.

 

 

Lorsque le soleil disparaît derrière l'horizon et que retentit tout près

l'appel à la prière, les lumières s'allument dans la coursive.

Reviennent alors en mémoire les moments forts des escales du jour :

accueil chaleureux des habitants d'un village perdu de Nubie

ou magie de la découverte d'un temple plusieurs fois millénaire.

 

 

La vidéo qui suit se déroule au rythme de la navigation.

Les rives du fleuve y défilent lentement,

entrecoupées d'images, souvenirs éblouis de merveilleuses visions

d'une civilisation raffinée 

qui naquit un jour des eaux originelles.

 

Une vidéo à ne surtout pas regarder si vous êtes pressés par le temps ..

 

 

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Au Fil du Nil
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25 mars 2017 6 25 /03 /mars /2017 19:45

 

 

Il n'est pas question ici de l'Egypte des Pharaons

aussi sublime soit-elle.

Il n'est pas question non plus de l'Egypte des grands hôtels internationaux.

Cette Egypte, c'est l'Egypte des ruelles du vieux Caire,

l'Egypte des villages écrasés de soleil de la vallée du Nil

où les murs racontent des histoires.

Une Egypte d'ombres et de lumières.

Une Egypte pudique, oubliée des touristes.

Chaque instant y est précieux.

Chaque scène fugitive y est un moment de grâce. 

Cette Egypte là révèle l'ouverture, la curiosité, la générosité,

la très grande gentillesse d'un peuple attachant.

Ces quelques clichés n'auraient pas été possibles sans la présence

aux côtés de notre petit groupe du photographe Denis Dailleux,

amoureux inconditionnel de ce pays.

Il a su nous faire partager sa passion

et nous en dévoiler un peu la face cachée.

 

Je lui exprime ici toute ma reconnaissance.

 

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Lumières d'Egypte
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21 octobre 2016 5 21 /10 /octobre /2016 10:42

 

Elles ont surgi de la nuit, sans un mot,

et les oiseaux se sont tus sur leur passage.

 

 

 

Elles sont sorties de la grande forêt.

Leurs visages étaient peints du rouge de la vie et du blanc de l'autre monde.

 

 

 

Magiciennes ou sorcières, esprits féminins de la jungle ou jeteuses de sorts ?

Elles connaissent les sortilèges et les maléfices de la grande forêt,

les racines qui guérissent et les baies qui ensorcelent.

 

 

 

Dans ce pays étrange, des écharpes de brume s'accrochent perpétuellement à la cime des arbres, comme si les âmes des ancêtres ne se décidaient toujours pas à abandonner le lieu où ils vécurent.

 

 

Des fleuves majestueux se lovent comme des serpents, baignant des rives mystérieuses et bruissantes de vie.

 

 

A n'en pas douter, les femmes-feuilles sont les gardiennes de ce monde inviolé que notre civilisation industrielle risque de voir bientôt disparaître 

 

 

 

Plusieurs d'entre elles ont l'âge des souvenirs et des secrets enfouis du passé mais elles ont à cœur de transmettre à leurs filles un savoir et des traditions qui, autrement,  disparaîtraient inexorablement avec elles.

 

 

Ces femmes, je les ai photographiées en Papouasie-Nouvelle Guinée, à l'occasion du Festival de Goroka 2016.

Elles sont originaires de la région de Mul Baiyer, Waur Waur, dans la province des Western Highlands, et avaient constitué un groupe, ironiquement dénommé 'Black Mama'.

 

 

Il est tout à fait remarquable, et encourageant, dans un pays où la violence faite aux femmes est un mal endémique et où, il y a peu encore, il n'était pas inhabituel d'apprendre par les journaux que, dans un village isolé, on avait torturé et brûlé une prétendue sorcière, que des groupes exclusivement féminins commencent à participer à de grands festivals culturels.

Les Western Highlands, comparées à d'autres provinces du pays, sont réputées plus favorables à des sociétés de type matriarcal.

Le Goroka Show, le plus ancien de Papouasie-Nouvelle Guinée, est également considéré plus sécurisant que son grand rival de Mount Hagen où l'insécurité est récurrente  Les groupes venus de la côte et les rares groupes féminins préfèrent donc se produire à Goroka plutôt que côtoyer les farouches ethnies des montagnes centrales.

Il est donc permis d’espérer que ce pays, trop longtemps décrit comme le pire qui soit quand on est une femme, évolue lentement vers une situation apaisée, grâce notamment au courage de groupes tels que les 'Black Mama' qui perpétuent des traditions féminines millénaires.

 

oooOOOooo

 

 

 

 

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2 octobre 2016 7 02 /10 /octobre /2016 17:40

 

Ce n'est pas parce qu'on habite au fin fond de la Papouasie-Nouvelle Guinée que l'on a pas envie de faire de la musique.

 

Ici, point de sono assourdissante, de lasers, d'effets spéciaux.

 

On revêt ses habits de fête, ou plutôt on se pare de quelques jolis feuillages et on se réunit pour chanter et danser autour de l'instrumentiste vedette,

le batteur.

 

 

La batterie, c'est un ensemble de tuyaux de bambou que l'on a immobilisé avec une bouteille d'Orangina et que le percussionniste inspiré frappe allégrement avec une paire de vieilles savates.

 

Un couple de guitares peintes en vert scarabée complète l'ensemble instrumental.

 

Le groupe s'appelle le Kupa Muddy String Band.

Leur musique est la plus joyeuse et la plus irrésistiblement entrainante qui soit.

 

Faites bien attention toutefois, ce petit air endiablé risque de ne plus vous quitter !

 

 

Kupa Muddy String Band, Chuave - S.Province - PNG

Bamboo Swing
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