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20 décembre 2013 5 20 /12 /décembre /2013 23:37

 

Dans la grande forêt équatoriale africaine on entend parfois un oiseau dont le cri évoque à s'y méprendre les pleurs d'un bébé. A n'en pas douter, les Lega, ces peuples des confins orientaux de l'actuelle République Démocratique du Congo, aux frontières de l'Uganda, du Rwanda et du Burundi, qui vivaient autrefois en parfaite harmonie avec la nature dans cette riante région riveraine des Grands Lacs de l'Afrique centrale, auraient pu l'identifier et en interpréter le message.

 

 

Photo Eliot Elisofon, 1967, National Museum of African Art, Smithsonian Institution Washington - USA

 

Malheureusement, cette région prospère qui aurait pu être l'image d'un paradis sur terre, est depuis près de vingt ans le théâtre d'atroces combats et de massacres quasi incessants pour le contrôle des terres, des richesses minières et du pouvoir, qui terrorisent la population. Les tirs de kalachnikov y ont désormais supplanté le chant des oiseaux.

Loin de ces horribles conflits, le Musée du Quai Branly présente actuellement une envoûtante exposition autour de la collection Jay T. Last de masques et d'objets rituels des Lega, collectés pour l'essentiel à l'époque où le Congo était encore une colonie belge. 

 

 

Alignés bien sagement dans leurs vitrines, les masques à longue barbe de fibres, si caractéristiques de l'ethnie, semblent flotter en apesanteur et onduler comme s'ils avaient gardé en mémoire le rythme lancinant des danses à l'occasion desquelles ils étaient portés.

 

 

Il faut dire que, pour un amateur d'art africain, reconnaître au premier regard qu'un masque est Lega est grandement facilité par le fait que l'art de ces peuples ne ressemble en rien à celui d'autres ethnies et que ses particularités, ovale des visages, nez droit, symétrie des yeux, barbe de fibres, blanc de kaolin et cet air toujours de tristesse élégante et indéfinissable font qu'il l'identifiera à coup sûr. 

 

  

 

 

 

 

L'art des Lega n'a connu que récemment la notoriété. C'est sans doute à la maîtrise de leurs sculpteurs, ces témoins de l'invisible, dans le travail de petits objets en os ou en ivoire, à la belle patine qui va d'une douce couleur miel à un somptueux rouge sombre , que l'on doit l'envolée spectaculaire des prix en vente publique.

 

 

 

 

 

Qu'il s'agisse de masques, de statuettes, d'objets de divination, de coiffures ou encore d'ornements de prestige ou insignes emblématiques, tous les objets d'art Lega ne sont créés que dans un seul but, servir de supports d'enseignement ou d'accomplissement des rites de la société initiatique du Bwami qui occupe une place déterminante au sein de la vie sociale et religieuse de ces peuples.

 

 

 

Le Bwami est une association ouverte à tous les membres de la communauté, hommes et femmes. Organisée en grades, dont on gravit les échelons tout au long de sa vie, elle implique, à chaque niveau des cycles d'initiation, des obligations financières et le passage par une série de rites qui mêlent musique, danse, sagesse proverbiale et arts divers. Dans ce contexte, les oeuvres d'art sont des codes laissés par les ancêtres, que l'initié saura décrypter pour en tirer les enseignements cachés.

 

 

 

 

La grande originalité de la production artistique Lega dévolue au Bwami est l'utilisation dans un but pédagogique ou de reconnaissance hiérarchique d'éléments aussi divers que des cuillers, des ornements de coiffure, des statuettes zoomorphes, mais aussi des éléments divers non transformés, d'origine végétale ou animale, qui trahissent l'étroite symbiose entre les Lega et leur environnement naturel.

 

 

 

 

 

 

Les rares initiés parvenus au stade ultime du Bwami étaient des sages tenus d'observer un code de conduite morale idéal, axé sur la vérité et spirituellement irréprochable, ce qui n'empêcha pas l'administration coloniale belge, qui y voyait un inquiètant contre-pouvoir, d'interdire l'association et d'en exiler les membres influents.

 

 

Que reste-t'il aujourd'hui du Bwami ? Difficile de le dire, bien qu'il semble qu'il se soit fortement politisé et qu'il soit devenu un symbole de l'individualité Lega. En tout état de cause, les atrocités n'ont jamais cessé dans la région des deux Kivu, habitat principal des Lega. Selon des ONG présentes dans la zone, rien que pour le premier semestre 2013, 3000 cas de viols ont été recensés au Nord Kivu et 9000 personnes déplacées au Sud Kivu. Toutes ethnies confondues, le nombre de morts dans cette partie de la République 'Démocratique' du Congo aurait atteint le chiffre effrayant de cinq millions en quatorze années.

Au Musée du Quai Branly, les murs faisant face aux vitrines d'exposition ont été décorés avec des représentations stylisées des objets-phares de l'art Lega. Leur aspect un peu fantomatique, en arrière-plan des délicates oeuvres offertes à la contemplation des visiteurs, semble nous rappeler qu'un monde n'est plus où l'on pouvait espérer, au terme d'une longue initiation, atteindre enfin le Beau et le Bien.

 

 

 

 

Triste ironie de l'histoire, le californien Jay T.Last, auquel on doit cette extraordinaire collection, est l'un des pionniers de la Silicon Valley et le concepteur de la première puice électronique, or l'une des raisons majeures des malheurs des habitants de l'est congolais est la fameuse 'malédiction des matières premières' et la richesse de leur sous-sol. Le Kivu est le premier producteur mondial de coltan, indispensable à la fabrication de nos chers portables. Les grands groupes internationaux n'hésitent pas à payer un droit de passage aux seigneurs de la guerre et aux groupes rebelles sévissant sur place pour s'assurer le libre approvisionnement du précieux minerai.

 

 

Peut-être après tout que, sous la tente d'un camp de réfugiés, un vieil homme, qui fut autrefois un grand dignitaire du Bwami, en entendant les pleurs des bébés alentour, se remémore le temps où, tandis que le soleil déclinait, il écoutait le cri de l'oiseau qui imitait si bien ces pleurs et se disait alors que cela n'augurait vraiment rien de bon.

 

oooOOOooo.

Mélancolie Lega au Musée du Quai Branly
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26 novembre 2013 2 26 /11 /novembre /2013 19:10

 

Pour cette deuxième promenade en zigzag, je vous convie à une balade franchement iconoclaste en compagnie de quelques représentants de la statuaire parisienne..

 

 

A Champs-Elysées - Clémenceau, le général De Gaulle presse le pas sous un ciel d'orage à la rencontre de son glorieux destin.

 

 

De l'autre côté de la place, Clémenceau se demande comment le général peut avancer si vite avec un tel vent.

 

 

Sur le parvis du Grand Palais, deux bambins stupides n'ont rien trouvé de mieux à faire que de s'ouvrir le ventre à coups de burin. Voilà ce qui arrive quand on laisse de vilains garnements sans surveillance.

 

 

Rue de Sèvres, ces deux là ont l'air trop gentils pour être honnêtes. Dieu sait quel tour pendable sont-ils en train de manigancer.

 

 

Sur la face Nord de l'Arc de Triomphe, ce vieillard est mort de peur et s'accroche où il peut. Se rend t-il seulement compte qu'il entrave ainsi la marche du guerrier ?. Vieillesse ne rime pas forcément toujours avec sagesse. 

 

 

Du côté du Petit Palais on s'ennuie ferme, mais, direz-vous, dans une vie de statue les divertissements sont plutôt rares.

 

 

Au cimetière du Père Lachaise, on n'a pas vraiment le moral, mais après tout, quoi de plus naturel en ce lieu.

 

 

Au cimetière Montparnasse, par contre, il y a quelqu'un qui ne parvient pas à trouver le repos, Charles Pigeon, l'inventeur de la célébrissime lampe. Lui  qui a permis à l'humanité de bénéficier d'inventions aussi géniales qu'un matelas insubmersible et une table de nuit inodore (!) tourne et retourne dans sa tête des projets qui, n'en doutons pas, devraient mettre en émoi la communauté scientifique.

 

 

Sur le pont de Grenelle, la statue de la Liberté, histoire de se rendre utile, a décidé de régler elle-même la circulation.

 

 

Sous le pont Mirabeau coule la Seine, ce n'est pas nouveau, et cette baigneuse impudique essaie vainement d'obtenir de l'aide pour atteindre le parapet.

 

 

Rue d'Abbeville, à la vue de ces affriolantes cariatides, on se demande vraiment quelle frustration poussait nos arrière grands-parents, qui prenaient des bains de mer tout habillés, à orner la façade de leurs immeubles d'accortes personnes aussi dévêtues.

 

..

 

Pas de quoi en tous cas distraire les doctes savants du Museum d'Histoire Naturelle qui posent pour la postérité devant leurs chers ossements blanchis.

 

 

Aux Invalides, l'Homme Invisible se repose après la bataille.

 

 

A Montmartre, le Passe-Muraille aux longs doigts décide, lui, de réapparaître à la vue de tous.

 

 

Sur le chantier du Trou des Halles, l'Homme qui écoute, téléphone pour savoir quand vont enfin se terminer les travaux.

 

 

Quai Anatole France on croit entendre ce beau jeune homme - qui visiblement n'a même pas eu le temps de se rhabiller - s'exclamer : 'Ciel, son mari !!'

 

 

Heureusement, le temps n'est pas aussi mauvais que l'hiver dernier quand les statues du Parc Monceau se recroquevillaient en grelottant de froid sous la neige.

 

 

Sur le parvis du Musée d'Orsay, ces imposantes dames de fer , qui ont connu l'ancienne gare, dévisagent avec incrédulité la petite effrontée, tout de même impressionnée, qui ose ainsi venir troubler leur sévère assemblée.

 

 

Aux Arènes de Lutèce, cette dame a carrément perdu la tête.

 

 

Au square Nadar, le malheureux chevalier de la Barre a retrouvé la sienne. Il faut dire qu'à peine âgé de 19 ans, ce gentilhomme avait été décapité en 1765 non sans avoir au préalable subi la question ordinaire et extraordinaire, eu la langue et le poignet coupés et être enfin brûlé vif. Tout cela en punition de quel crime atroce direz-vous : simplement parce qu'il n'avait pas soulevé son chapeau au passage d'une procession !! Autres temps, autres moeurs ... quoi que ...

 

 

A quelques pas de là, en l'église Saint Pierre de Montmartre, Saint Denis tient délicatement sa tête devant lui. Selon la légende, le premier évêque de Paris, martyrisé lui aussi, avait été privé de son chef. Avant d'aller s'enterrer dans le Neuf Trois, il aurait marché pendant 6 kilométres en portant sa tête sous le bras, traversant Montmartre par le chemin devenu depuis la rue des Martyrs (quelle coïncidence !).

 

..

 

Rue Fortuny, des rats à la dentition particulièrement solide grignotent un mur de l'hôtel particulier de Sarah Bernhardt comme s'il s'agissait d'un vulgaire morceau de fromage.

 

 

Sur la façade est de l'Hôtel de Sens, un boulet perdu des journées révolutionnaires de 1830 est venu se ficher dans le mur. Il y est toujours, la date de l'événement étant gravée au dessous.

 

 

Boulevard Saint-Germain, le mur du Ministère de la Guerre .. pardon, du Ministère des Armées, exhibe toujours fiérement les stigmates des combats furieux de la Libération de Paris.

 

 

Rue Royale, à deux pas de chez Maxim's, on peut toujours trouver placardé l'Avis de Mobilisation Générale, mais qui s'en soucie à présent ?

 

 

Peut-être que le général devrait revenir mettre un peu d'ordre dans tout çà ?

 

oooOOOooo

 

 

 

 

 

 

Paris en zigzag (2)
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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 17:35

 

Peut-être était-ce parce que je revenais d'un voyage en Inde.

 

 

Peut-être était-ce parce que nous étions à l'orée de l'hiver et que la ville était devenue grise, les trottoirs gris, les murs gris, le ciel gris, les visages gris. Toujours est-il que je me mis alors à traquer les couleurs dans la cité.

 

 

Ce furent les vrais artistes de la rue qui me montrèrent la voie. Ils avaient recouvert les murs sans joie de fresques incandescentes et la couleur illuminait ces parois aveugles vouées à une décrépitude inéluctable.

 

 

Vus de près, les détails de ces fresques pouvaient à eux seuls, si on les imaginait accrochés aux cimaises d'une galerie d'art, devenir des tableaux, véritables explosions de couleurs.

 

 

 

 

 

Je me dis alors que même les choses les plus banales et les plus insignifiantes de la rue,, dont nous avions oublié jusqu'à la couleur, si elles étaient présentées comme des oeuvres d'art, prenaient soudain une dimension nouvelle, qu'il s'agisse de la carrosserie d'une camionnette de livraison.ou de simples taches de peinture sur le trottoir.

 

.

 

 

 

C'était tout aussi vrai pour le flanc d'une péniche amarrée à quai, pour des bandes de couleur sur un vieux mur ou pour le rideau de fer tagué d'un commerçant. 

 

 

 

 

Et cela valait encore pour une enseigne de supermarché, un carton vide abandonné sur une poubelle, un graffiti dans une impasse, un vieux tuyau rouillé, un véhicule de pompiers, que sais-je encore.

 

 

 

 

 

 

Fort de ces constatations, je me réconciliai avec la ville  La couleur n'avait pas disparu à l'approche de l'hiver et il suffisait d'ouvrir grand les yeux autour de soi pour s'apercevoir qu'elle était toujours là, parfois même où nous ne la soupçonnions pas.

 

 

Peut-être qu'après tout nous n'étions pas si différents des Indiens. La couleur aide parfois à estomper la grisaille environnante.

 

 

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Une fringale de couleurs
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18 novembre 2013 1 18 /11 /novembre /2013 19:30

 

Flâner dans Paris, le nez au vent, au hasard des rues, c'est être assuré de revenir avec plein d'images dans la tête, étonnantes, inattendues, amusantes, incongrues ou poétiques.

La simple lecture du nom des rues peut donner lieu à bien des surprises.

 

 

 

Ces noms peuvent aussi être révélateurs de la condition des résidents qui habitèrent ces lieux il y a plus ou moins longtemps.

 

 

 

A voir cette plaque luttant désespérément contre un lierre envahissant, on se rend compte qu'il faudrait bien peu de temps pour que la nature reprenne vite ses droits sur le béton parisien.

 

 

Or, il se trouve parfois que des esprits facétieux détournent les noms des voies de manière ironique.

 

 

 

Certains panneaux indicateurs manquent totalement d'humour et peuvent laisser perplexe lorsque la localisation indiquée paraît par trop inadéquate..

 

 

La signalisation routière peut aussi, à l'occasion, faire l'objet de subtils détournements.

 

 

 

Sur les murs, il arrive qu'apparaissent d'étranges interdictions.

 

 

L'entrée du cimetière Montparnasse serait-elle également interdite aux centaures ?

 

 

Rue du Faubourg Saint-Denis le porche d'un immeuble pose une question existentielle.

 

 

 

Les noms des bistrots font assaut d'inventivité pour attirer le chaland.

 

 

 

J'aurais pour ma part une petite préférence pour ce restaurant de la rue du Bourg Tibourg bien que j'ignore à quels fous il est fait allusion.

 

 

Dans le même esprit, il y avait autrefois, rue de la Convention, un café situé juste en face de l'hôpital Boucicaut et qui s'appelait "Mieux vaut ici qu'en face". Il a été remplacé par un restaurant coréen qui ne cultive hélas pas le même sens de l'humour.

 

 

Devant la FNAC Etoile, il semblerait que les guerriers du 'Seigneur des Anneaux' ont échangé leurs fiers destriers contre des petits scooters. Quelle déchéance !!

 

 

Rue de Penthièvre, un chien curieux regarde les passants et, à Saint-Germain l'Auxerrois, une gargouille est à la limite de la perte d'équilibre pour tenter d'apercevoir ce qui se passe au carrefour.

 

 

Près du Centre Pompidou, un géant débonnaire tente en vain d'obtenir le silence.

 

 

Et pendant tout ce temps, à la Trinité, sur le toit d'un immeuble, il y a une cheminée qui danse...

 

 

Ici s'arrête cette promenade en zigzag.

A bientôt pour d'autres découvertes insolites et parisiennes.

 

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Paris en zigzag
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15 novembre 2013 5 15 /11 /novembre /2013 19:25

 

Il faut bien le reconnaître, un radiateur, surtout s'il n'est plus dans sa prime jeunesse, n'est pas particulièrement esthétique. Hantise des décorateurs d'intérieur, on cherche le plus souvent à le dissimuler honteusement plutôt qu'à le mettre en valeur. Ceux de la Tour 13, vouée à la démolition dans le 13ème Arrondissement de Paris, n'échappaient pas à la règle et la perspective d'une fin prochaine les rendait infiniment moroses. C'est alors que, sans crier gare, les stars du Street Art international investirent un beau jour la Tour pour la transformer d'un coup de bombe magique en Temple éphémère de l'Art Urbain.

 

 

Les radiateurs se trouvèrent soudainement propulsés du rang de figurants anonymes à celui d'acteurs à part entière d'un film dont le sujet différait à chaque étage et dans chaque pièce.

 

 

Ils eurent l'insigne honneur de donner la réplique aux vedettes.

 

 

On les habilla de brillantes couleurs.

 

.

 

On revêtit l'un d'eux d'un costume de lumière.

 

 

Un autre fut absorbé dans un décor inquiètant.

 

 

Certains se virent attribuer un rôle dans des drames intimistes.

 

 

D'autres connurent l'angoisse de polars haletants.

 

 

D'autres encore jouèrent les second rôles de films d'épouvante. 

 

 

Les plus audacieux s'emparèret du premier plan des séquences d'action.

 

 

Les chats, ces éternels frileux, vedettes des films animaliers, vinrent leur tenir compagnie entre deux tournages, 

 

 

Les radiateurs avaient le sentiment d'être enfin reconnus. Ils connaissaient leur heure de gloire.

 

 

Eux, les mal-aimés, plus à l'aise dans les recoins abrités des regards, se retrouvaient au centre de scènes d'apocalypse, mitraillés par les flashs de milliers de visiteurs.

 

 

Certains en perdirent la raison et en vinrent à commettre l'irréparable.

 

 

On retrouva même à la cave un radiateur hébété, figé devant l'horreur de son crime.

 

 

Je ne sais pas s'il existe un au-delà pour les radiateurs, mais quand sonnera l'heure de la démolition finale et qu'ils finiront à la casse, il conviendra de beaucoup pardonner à ces fidèles compagnons de nos hivers douillets car ils n'étaient pas faits pour cette soudaine mise en lumière.

 

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Je préfère imaginer, qu'avec la discrétion qui leur est coutûmière, ils auront quitté sur la pointe des pieds ces fresques étonnantes qui illuminèrent, le temps d'un automne, les murs tristounets d'une tour ordinaire.

 

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Les radiateurs de la Tour 13
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11 novembre 2013 1 11 /11 /novembre /2013 18:36

 

La belle déesse Durgâ, Durgâ Mâ, la Déesse Mère, déesse de l'énergie et du pouvoir, est vénérée partout en Inde et la grande fête qui lui est consacrée à l'automne, la Durgâ Pûjâ, donne lieu à de grandes célébrations festives, mais c'est dans l'Etat du Bengale et particulièrement dans sa capitale, Calcutta (Kolkata), que ces célébrations revêtent une ampleur et une intensité inégalées.

 

 

 

Bien des mois avant l'événement, les sculpteurs ont rivalisé d'adresse et d'ingéniosité pour réaliser des effigies, toutes plus belles les unes que les autres, qui sont ensuite recouvertes d'habits somptueux et parées de paillettes et de bijoux étincelants, et la rivalité est grande entre quartiers, à qui possédera la plus belle, la plus grande et la plus resplendissante des déesses.

 

 

Les effigies, une fois réalisées, sont exposées, pendant la période festive, dans les différents quartiers de la ville, soit dans des structures permanentes, soit dans des installations temporaires, souvent des tentes, les pandals, qui seront démontées après la fête. On prétend qu'ii y a jusqu'à 2000 pandals à Calcutta pendant la Durgâ Pûjâ.

 

 

C'est en famille, le soir de préférence, quand la ville resplendit sous un déluge de guirlandes lumineuses qui dévalent en cascade de la plupart des bâtiments, que l'on se rend dans les principaux pandals, au milieu d'une joyeuse bousculade, pour admirer les plus belles réalisations.

 

 

Bien sûr, tous les quartiers ne peuvent pas s'offrir ces extraordinaires effigies, mais la vénération dont Durgâ Mâ fait l'objet et la ferveur avec laquelle elle est partout honorée font du moindre petit autel de rue un lieu d'intense recueillement.

 

 

ll y a bien longtemps de cela, un horrible démon, Mahishâsura, massacrait les Dieux et mettait en péril leur souveraineté et l'équiibre de l'Univers. Comme il ne pouvait être vaincu que par une puissance féminine, les Dieux firent apparaître Durgâ et la dotèrent d'armes terribles afin de lui permettre de vaincre le démon et les pulsions du mal. Tous contribuèrent  Shiva fournit le trident, Vishnu, le disque magique, le Dieu du Feu, la lance, le Dieu du Vent, les flèches...Himalaya, le Dieu des Montagnes, offrit à la belle guerrière un superbe Lion pour l'aider dans son entreprise. 

 

 

 

Chevauchant le lion rugissant et brandissant ses armes avec ses bras multiples, Durgâ triompha du démon dont elle transperça finalement le coeur avec son trident, ramenant ainsi la Paix, l'Harmonie, la Joie et l'Amour dans l'Univers.

 

 

Belle et séduisante, incarnation divine au féminin, à la fois combattante et Mère suprême, elle est aussi gentille épouse, symbole de l'unité familiale et est couramment implorée pour remèdier aux dfficultés de la vie quotidienne. C'est pour toutes ces raisons que les femmes la vénèrent tout particulièrement.

 

 

Aussi, avant que les idoles ne soient amenées au Fleuve au dernier jour de la Fête, les Femmes, de tous âges et de toute condition, revêtent leur plus beau sari et se rendent aux lieux où sont exposées les idoles, pour déposer des offrandes à leurs pieds et appliquer sur les représentations de la déesse et des divinités qui l'accompagnent (Ganesha à tête d'éléphant, le Seigneur des Obstacles, n'est jamais bien loin), des marques de sindur,la poudre vermillon.

 

 

On peut voir alors, un peu partout, les femmes mariées exprimer leur joie, danser, et s'appliquer généreusement des marques de vermillon sur le front et les joues, censées conférer bonheur et longévité à leur condition d'épouse et de mère.

 

 

Au cinquième jour, la déesse est conduite en procession vers le Fleuve où elle sera immergée.

 

 

Les idoles les plus importantes sont transportées à dos d'homme sur des perches de bambou, souvent accompagnées d'une fanfare, au milieu d'une joyeuse bousculade, mais.la grande majorité d'entre elles arrive des différents quartiers sur des camions, en une file ininterrompue qui se prolongera tard dans la nuit.

 

 

Chaque idole est accompagnée de ses fervents adorateurs et, une fois le camion parvenu en haut des marches qui mènent à l'Hooghly, un bras du Gange qui arrose Calcutta, le déchargement de la déesse donne lieu à des scènes d'effervescence et de liesse

 

 

 

 

A peine déchargées des camions, les porteurs des idoles leur font accomplir cinq tours traditionnels au milieu d'une foule enthousiaste, tandis qu'au son du tambour, les femmes exécutent quelques pas de danse.

 

 

 

 

Vient ensuite la descente des marches jusqu'au fleuve, qui donne lieu à une belle bousculade, chacun tentant  d'immortaliser l'image de la Déesse avant qu'elle ne bascule dans les flots 

 

 

 

L'excitation est à son comble et on s'efforce de toucher une dernière fois le visage de la divinité avant qu'elle n'entreprenne son voyage.

 

 

Pendant ce temps, un peu plus loin, avec d'infinies précautions, les hommes ont déposé une effigie géante sur une embarcation. Parvenue au milieu du fleuve, ils la font basculer dans l'eau limoneuse au moyen de longues perches de bambou. En un instant elle a disparu et une longue clameur salue le départ de Mâ Durgâ pour le voyage qui la raménera auprès de ses parents, là-bas dans les montagnes de l'Himalaya.

 

 

Sur la rive  l'émotion étreint les spectateurs. On prie pour que Durgâ, après son court séjour parmi les hommes, revienne à nouveau l'an prochain pour triompher du Mal et apporter à tous santé et prospérité.

 

 

Entre deux arrivées d'idoles, on va s'immerger dans le fleuve et on s'asperge copieusement d'eau sacrée.. au grand dam des caméras qui fixent la scène.

 

 

 

Déjà une autre idole étincelante est prête pour le grand voyage aquatique, bientôt suivie par le gentil et fidèle Ganesha, le compagnon de toujours.

 

 

En se faufilant hardiment dans la mêlée et en jouant habilement des coudes, on a encore une petite chance d'entrevoir ce monde merveilleux et coloré de dieux et de déesses avant qu'il ne s'abîme définitivement dans l'eau trouble.

 

 

Demain, les pandals auront été démontés. Au carrefour, l'Homme - Cheval attendra comme chaque jour, avec résignation, d'hypothétiques clients.

 

 

Sur les murs rongés d'humidité, des panneaux publicitaires rappeleront la grande fête célébrée en l'honneur de la Déesse aux yeux immenses qui revient chaque année à l'automne pour sauver le Monde du chaos.

 

 

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Et le cinquième jour, Durgâ s'en retourna au Fleuve
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8 novembre 2013 5 08 /11 /novembre /2013 23:15

 

Non, non, je vous assure, vous auriez bien tort de penser que je vous convie au tournage d'une scène de film érotique.

 

 

Nous sommes à Kumartuli, le quartier des sculpteurs de Calcutta, et cet alignement surréaliste de mannequins dévêtus est le fruit du travail de ces artisans qui préparent d'arrache-pied un prochain festival.

 

 

Etant donné que l'Inde doit détenir le record du monde du nombre de célébrations festives au cours d'une même année, le travail assurément ne manque pas et il régne toujours une grande activité dans ce quartier si particulier.

 

 

De prime abord on est un peu surpris quand on aborde le quartier par cet ensemble hétéroclite de barraques dont la plupart ne sont qu'un assemblage fragile de bambous et de toiles de tente.

 

 

Mais qu'on ne s'y trompe pas, c'est d'un gros business qu'il s'agit là et les commandes affluent de toutes parts: festivals, cérémonies religieuses de toutes confessions, ornementation des temples et églises, commandes publiques et privées, expéditions dans le monde entier car la diaspora indienne couvre les cinq continents.

 

 

Et ici, on est éclectique et tout à fait capable de s'adapter à une demande extérieure aux représentations codifiées des dieux et déesses du panthéon hindouiste.

 

 

 

Mais revenons aux jolies déesses qui nous avaient troublées d'entrée. Tout est parti d'un squelette en bambou que le sculpteur a recouvert d'un assemblage de paille et d'argile pour lui donner la forme que la statue devra, selon des codes précis, recouvrer une fois achevée.

 

 

Ensuite viendra le stade du séchage.

 

 

 

Auquel succédera, passé le temps nécessaire, l'opération de mise en peinture.

 

 

C'est alors qu'interviendra la phase du maquillage. Les sculpteurs se transmettent leur savoir-faire de génération en génération, mais c'est généralement au plus ancien que reviendra l'honneur d'effectuer cette opération.

 

 

Enfin, viendra le temps des dernières retouches,avant que les effigies ne soient parées et revêtues de saris somptueux.

 

 

Une fois achevées, les jolies déesses ( en l'occurence des représentations de Lakshmi  l'épouse de Vishnu, reconnaissables à la chouette qui leur tient compagnie), seront prêtes à recevoir l'hommage éperdu et fervent de leurs fidèles.

 

 

Avant de quitter ce quartier fascinant et de replonger dans le maëlstrom du trafic de Calcutta, jettons encore un oeil indiscret sur quelques échoppes alentour où se côtoient les créations les plus diverses.

 

 

 

Mais là, dans ce recoin, en attente de finition, ne serait-ce pas Dûrga chevauchant une lionne, Dûrga l'inaccessible, à la beauté surnaturelle, Dûrga la Déesse Mère, aux huit bras et aux trois yeux, guerrière terrible mais aussi garante de la paix dans l'Univers ?

 

 

 

Dûrga est vénérée partout en Inde, mais plus encore au Bengale et particulièrement à Calcutta, où les célébrations qui se déroulent en automne en son honneur donnent lieu à une fête énorme, inoubliable, la Dûrga Puja.

Elle devrait faire l'objet d'un prochain article.

 

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Les Sculpteurs de déesses.
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4 novembre 2013 1 04 /11 /novembre /2013 16:05

Cela faisait des lustres que je rêvais de visiter le palais Chhota Imambara à Lucknow dans le nord de l'Inde, cette capitale de l'état de l'Uttar Pradesh bien souvent ignorée des circuits touristiques.

Vu du bassin central, il faut reconnaître que l'architecture du palais, de style indo-islamique, est indéniablement élégante.

 

 

Flanqué de deux mini reproductions en plâtre blanc du Taj Mahal, l'ensemble dégage sans conteste une certaine grandeur.

 

 

 

La façade, ornée de superbes calligraphies en arabesques de marbre est admirablement sculptée.

 

 

Mais, direz-vous, pourquoi ce palais plutôt qu'un autre, dans ce pays qui regorge de monuments plus merveilleux les uns que les autres ?

La réponse est simple, je suis un inconditionnel du LUSTRE !

 

 

A peine franchi le seuil (inutile de lustrer ses chaussures pour l'occasion, il faut les laisser à l'extérieur..) on pénétre sous une voûte scintillante faite de dizaines et de dizaines de lustres, chandeliers et luminaires en tous genres.

 

 

Dans toutes les pièces, une cascade, que dis-je, une cataracte de perles de verre, de gouttelettes, de chapelets, de stalactites, de boules cristallines, de tentacules opalescents est déversée depuis le plafond sur le visiteur abasourdi.

 

 

 

Et comme on est en Inde, patrie incontestée de la couleur, l'oeil se perd dans un chatoiement multicolore, kaléidoscope qui fait écho aux couleurs vives des tapis, des murs et du plafond du palais.

 

 

Pour couronner le tout, des miroirs aux encadrements d'or fin, placés au coin de chaque pièce, renvoient à l'envie, l'image de ce déferlement scintillant.

 

 

 

Et n'oublions pas les appliques murales, plus discrètes, qui égrennent leurs perles brillantes dans les recoins, les encoignures, qui auraient autrement échappé au déluge cristallin ambiant.

 

 

Ce palais, on le comprend aisément, a été souvent décrit comme 'le Palais des Lumières'. Sa construction a démarré en 1838, à l'initiative du nabab - éclairé - Mohammed Ali Shah, l'un de ces seigneurs musulmans d'origine shiite persane qui contrôlèrent la région à partir du déclin des princes moghols... avec la bénédiction des autorités britanniques.

 

   

 

Il se trouve qu'en 1838, une effroyable famine sévissait dans la région. Le mérite revient à l'illustre nabab d'avoir instauré avant l'heure un programme 'Travail contre Nourriture' qui permit à des milliers d'ouvriers employés à la construction de l'ouvrage - et à leur famille - de ne pas mourir de faim.

 

 

Il convient de préciser toutefois qu'alors que les simples ouvriers travaillaient le jour quand la température flirtait allégrement avec les 50°, les gens de plus noble extraction travaillaient eux la nuit.. à la fraiche.

 

 

Ceci dit, le palais fut achevé en 1842 et servit en fin de compte de mausolée au nabab dont le tombeau, ainsi que ceux de son épouse et de ses enfants, se trouve dans le palais même.

 

 

Entretemps , ce seigneur épris de luxe et de lustres avait eu l'idée lumineuse de faire venir d'Europe (principalement de Belgique nous dit-on) ces chandeliers extraordinaires et multicolores.

 

 

On imagine sans peine les fêtes somptueuses qui ont pu se dérouler dans cet éblouissant environnement.

 

 

Allons, un dernier lustre pour la route ??

 

 

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Un Palais qui a du lustre
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6 septembre 2013 5 06 /09 /septembre /2013 23:10

Vous ne vous en êtes peut-être pas encore vraiment rendu compte, mais il y a à Paris plus de lions que dans toute la savane africaine.

 

Bien sûr, vous penserez tout de suite au plus majestueux d'entre eux, place Denfert -Rochereau, sculpté par Bartholdi - celui de la statue de la Liberté -, réplique au tiers du lion de Belfort, mais il n'est que le représentant le plus visible de la foule de grands fauves qui s'est subrepticement appropriée la capitale.

 

Regardez bien, ils sont partout. Tapis sous votre fenêtre, rue Montorgueil.  

 

Dissimulé sous votre balcon, rue de Valois.

 

Jouant les descentes de lit, quai des Célestins.

 

Déguisés en cariatides ailées, avenue de Tourville.

 

Surveillant les allées et venues au-dessus de vos têtes, rue Condorcet.

 

Guettant vos moindres faits et gestes depuis le toit des Archives Nationales, rue des Archives (évidemment).

 

Boulevard de Ménilmontant, ils contrôlent carrément l'accès à votre immeuble.

 

Ce contrôle semble d'ailleurs s'exercer plus discrètement rue Vivienne.

 

Il convient toutefois de préciser que cette prise de pouvoir ne s'est effectuée que fort progressivement et qu'un esprit de revanche sur le triste sort du lion de Némée (dont l'image - ô combien humiliante - est toujours visible dans la cour carrée du Louvre) a longtemps animé les grands félins. 

 

Pour arriver à leurs fins il leur a bien souvent fallu tirer la langue, comme ici, boulevard Saint-Germain.

 

Pour survivre, ils ont parfois servi de repose-poulaines aux gisants de Saint-Denis.

 

Ils ont subi sans rugir les jeux stupides d'angelots frondeurs qui les utilisaient comme montures, ainsi qu'en témoigne ce bas-relief sur la porte d'un hotel particulier de la rue  Vieille-du-Temple

 

 Ils ont dû tenir avec les dents, qu'ils ont certes puissantes, (tout de même!) les marquises du Bon Marché.

 

La haute finance avait fini par en faire de ridicules accoudoirs, ainsi qu'on peut le vérifier au fronton du siège de la BNP, rue Bergère.

 

 

Mais quel chemin parcouru depuis ! Les grands fauves ont désormais placé leurs économies au Crédit Lyonnais, cela va sans dire, et ils ménent à présent une existence dorée, qu'illustre ce lion repu rue St.Honoré.

 

Plus besoin de se cacher derrière une guirlande de feuillage, comme ce lion craintif de la rue Charlemagne. 

 

Le monde appartient aux lions, dixit ce fier porteur de crinière, avenue de Villars.

 

 

Certains en deviennent bouffis d'orgueil à l'exemple de ce specimen indigne de la rue du Faubourg St.Honoré.

 

Mais c'est vraiment place Saint Sulpice que l'on peut mesurer l'étendue de l'emprise de la gent léonine sur Paris. Aux quatre points cardinaux de la fontaine des quatre évêques (qui ne furent jamais nommés cardinaux...), des lions rugissants tiennent solidement entre leurs griffes les armoiries de la ville.

 

L'un d'eux d'ailleurs est fou de rage et ne supporte pas l'ignominieuse présence d'un pigeon lèse-majesté venu souiller sa noble crinière.

 

Alors, si d'aventure vous rencontrez un lion endormi, tel celui du musée Jacquemart-André, boulevard Haussmann, de grâce, ne le réveillez surtout pas.

 

Comme vous pouvez le constater sur cette fresque murale de la rue de l'Ourcq, son réveil serait vraiment terrible.

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Les Lions ont envahi Paris
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19 août 2013 1 19 /08 /août /2013 18:00

Cette fois-ci, je vous convie à une promenade poético-relaxante, qui combine découverte pédestre et navigation tranquille sur ces canaux qui font le charme du Nord-Est de la capitale.

Départ du parc de La Villette dans le 19ème Arrondissement.

 

 

Non loin de l'embarcadère, là où le Bassin de La Villette rejoint le canal de l'Ourcq, le manège Jules Verne tourne inlassablement et le joli Nautilus bleu-pâle du Capitaine Nemo obtient toujours les faveurs des enfants épris d'aventure.

A la jonction du bassin et du canal Saint-Denis, les péniches amarrées ont des noms évocateurs;

 

 

Nous voilà partis. A l'entrée du canal Saint-Martin, un gentil réverbère semble veiller affectueusement sur les furtifs occupants temporaires de la berge.

 

 

Côté quai de Valmy, passée la place de la bataille de Stalingrad, les taggeurs et autres adeptes du street art ont donné libre cours à leur talent ou exprimé leurs révoltes.en couleurs somptueuses.

 

Mais revenons au canal Saint-Martin au fil duquel nous voguons maintenant paisiblement. Il relie le bassin de La Villette au port de l'Arsenal qu'il rejoint après 9 écluses et 2 ponts tournants et après avoir disparu sous terre, ou plutôt sous le boulevard Jules Ferry, le boulevard Richard Lenoir et la place de la Bastille, soit un total de.4,55 km, dont 2 en souterrain, pour une dénivellation totale.d'environ 25m.

Ce serait bien sûr un lieu commun que d'évoquer le charme incontestable de ce canal, avec ses écluses aux eaux bouillonnantes, ses élégantes et romantiques passerelles, ses berges bordées de platanes centenaires et ses rives où il fait bon flâner, truffées de restos sympa et de boutiques originales.

 

 

 

 

Bien sûr, un esprit chagrin pourrait se demander pourquoi a t'on affublé de noms lugubres certains lieux traversés, comme le bassin des Morts ou l'écluse des Morts, Tout bonnement parce que s'élevait là autrefois, dans le quadrilatère constitué par le quai de Jemmapes, la rue des écluses St. Martin, la rue Louis Blanc et la rue de la Grange aux Belles (un si joli nom...), le sinistre Gibet de Montfaucon qui pouvait exposer à la vue du bon peuple de Paris jusqu'à 50 pendus à la fois, à des stades divers de décomposition. Il a été détruit en 1760, mais sa simple évocation rafraîchit tout de même l'atmosphère.

Tiens, à propos d'atmoshère, voilà que le passage dans l'écluse des Récollets nous donne l'occasion de rêver devant le si romantique Hotel du Nord.

 

 

Même si le célèbre film de Marcel Carné fut en fait tourné aux studios de Billancourt et le décor de l'hotel entièrement reconstitué, il n'en demeure pas moins que l'endroit dégage un charme certain, même s'il ne s'agit plus que d'une façade et que le café-restaurant qui occupe le rez-de-chaussée a un décor d"époque" lui aussi reconstitué.

Passées les écluses du Temple, le canal disparaît sous terre dans ce que l'on appelle les voûtes. ll ne réapparaîtra à l'air libre qu'après la place de la Bastille, traversant la "marina" de l'Arsenal, plus évocatrice de plaisances hauturières que du coeur historique de la capitale.

Là dessous, il régne une atmosphère (décidément !) étrange.

 

 

La ventilation et l'éclairage des voûtes sont assurés par des "oculi", sorte de puits de lumière grillagés circulaires , espacés chacun de 60 ou 120 mètres, qui débouchent directement au dessus sur les squares et espaces verts de la longue promenade qui se termine au square St. Sabin.

 

 

Bien que cette pérégrination dans les entrailles parisiennes soit bien "envoûtante", il serait tout de même dommage de ne pas jeter un oeil sur ce qui se passe en surface où le trafic incessant du boulevard Richard-Lenoir ignore superbement qu'en dessous coule une rivière.

 

 

On a beau être un tag, on n'en a pas moins soif, semble affirmer ce personnage apperçu au travers des fontaines du square Richard-Lenoir et qui paraît absorber goûlument cette eau providentielle.

 

 

Et dire que certains prétendent qu'il n'y a pas de cigognes à Paris !!

 

Au numéro 57 du boulevard, un ancien hôtel particulier à l'impressionnante façade de style Louis XVI / Empire, tranche avec l'anonymat des immeubles environnants, évocateur d'un passé fort différent de la vie actuelle du quartier. 

Arrivés place de la Bastille, on ne peut qu'être saisi par ce maëlstrom incessant d'une circulation automobile débridée (sauf bien sûr si on continue à jouer les égoutiers dans le canal...). Il suffit pourtant d'à peine quelques pas pour vous retrouver hors du temps, hors du bruit et de la foule, avec l'impression d'être soudainement plongé plusieurs siècles en arrière quand les sabots des chevaux résonnaient encore sur les pavés.

 

 

Au débouché du boulevard Richard-Lenoir sur la place de la Bastille, tout près de l'accès au métro, l'entrée de la cour Damoye passe pratiquement inaperçue tant les terrasses des cafés sont envahissantes, pourtant, à peine franchi le seuil, on est en plein XVIIIème siècle. .et au calme. La cour pavée est bordée de beaux immeubles restaurés, caractéristiques de l'époque,avec boutiques d'artisans et poutres apparentes en rez-de-chaussée. Un vrai bonheur !

Le quartier Saint-Antoine est d'ailleurs prodigue en heureuses surprises.pour qui sait échapper au brouhaha incessant des voies principales.

 

 

Le passage du Cheval Blanc, par exemple, auquel on accède par un coude discret depuis la place, côté rue de la Roquette, offre une amusante succession de cours qui nous font voyager au fil du calendrer: cour Janvier, cour Février et ainsi de suite  jusqu'à Juin. Toutes sont bordées d'ateliers, certains à pans de bois datant du XIXème siècle, qui servirent longtemps de dépôts aux artisans du Faubourg.

Après avoir emprunté la rue de Lappe, plus active la nuit que le jour  et où les paveurs semblent n'avoir tenu aucun compte des instructions pourtant explicites de l'établissement devant lequel ils travaillent... 

 

 

...nous traversons la rue de Charonne et pénétrons dans le passage Lhomme qui sera l'aboutissement de cette deuxième balade parisienne.

 

 

Un hâvre de paix. On se croirait loin, quelque part en province..Les glycines embaument et les vignes s'accrochent aux façades. Fait plutôt rare à Paris, on entend les oiseaux...

 

 

Quelques anciens ateliers subsistent, fleurant bon la colle et le vernis, évocateurs de la vie du Faubourg au siècle dernier.

 

 

La porte défraîchie d'un garage d'antan nous laisse imaginer la sortie du dimanche de la torpedo de nos grands-pères.

Paris décidément n'en finit pas de nous surprendre.

 

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Balades à la rencontre d'un Paris insolite (2)
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  • : Pourquoi ce blog? Pour ne pas oublier tous ces rivages, proches ou lointains, que j'ai connus, pour faire partager ces regards, ces visions, ces impressions fugaces, ces moments suspendus et qui ne se reproduiront plus, pour le plaisir de montrer des images et d'inventer des histoires, pour rêver tout simplement..
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